« Ainsi, des Touaregs furent exhibés
à Paris durant les mois suivant la conquête française de Tombouctou en 1894
; de même, des Malgaches apparurent une année après l'occupation de Madagascar
; enfin, le succès des célèbres amazones du royaume d'Abomey fait suite à la
très médiatique défaite de Behanzin devant l'armée française au Dahomey. La
volonté de dégrader, d'humilier, d'animaliser l'autre - mais aussi de glorifier
la France outre-mer à travers un ultranationalisme à son apogée depuis la défaite
de 1870 - est ici pleinement assumée et relayée par la grande presse, qui montre,
face aux colonisateurs, des « indigènes » déchaînés, cruels, aveuglés de fétichisme
et assoiffés de sang. Les différentes populations exotiques tendent ainsi à
être toutes montrées sous ce jour peu flatteur : il y a un phénomène d'uniformisation
par la caricature de l'ensemble des « races » présentées, qui tend à les rendre
presque indistinctes. Entre « eux » et « nous », une barrière infranchissable
est désormais dressée.»
Extrait du Monde Diplomatique
(article "Ces
zoos humains de la République coloniale", Blanchard, 2000)